[TRIBUNE de Robert Staacke, QUANTUM TECHNOLOGIES (photo) et Christian Reinwald, REICHELT ELEKTRONIK] Dans l’univers des technologies quantiques, les capteurs occupent une place essentielle, bien qu’ils soient souvent éclipsés par l’attention portée à l’ordinateur ou aux réseaux de communication quantiques. Pourtant, ces dispositifs dépassent largement les limites de la technologie des capteurs classiques, repoussant les limites de l’innovation et se distinguant par leur cas d’usage plus précis. Etat des lieux par de Robert Staacke, le fondateur de Quantum Technolgies (*) et Christian Reinwald, responsable de la gestion des produits et du marketing chez le distributeur Reichelt Elektronik.
Aujourd’hui, les tâches de mesure dans l’automatisation des chaînes de fabrication et des processus, mais aussi dans le monde automobile ou médical, sont sans cesse confrontées à de nouveaux défis mettant à rude épreuve les capteurs déjà en place. Or, les industriels ont besoin de processus précis, reproductibles et évolutifs, qui s’intègrent dans les applications évoluant dans des conditions d’utilisation défavorables ou même inaccessibles.
Dans ce contexte, les capteurs quantiques optiques se distinguent par leur sensibilité et leur précision exceptionnelles. Contrairement aux capteurs à effet Hall ou magnétorésistifs par exemple, ils réagissent avec robustesse aux variations de température et mesurent sans hystérésis.
Comment fonctionnent les capteurs quantiques ?
Les interactions physiques quantiques à l’échelle subatomique qui peuvent par exemple être générées et contrôlées dans les cristaux de diamant, constituent la base de la technologie de Quantum Technologies. En général, les scientifiques se concentrent sur les centres dits azote-lacune (centre NV) présents dans les cristaux de diamant. Un centre azote-lacune est l'un des nombreux types de défauts ponctuels présents dans la structure cristalline du diamant. Il résulte de la juxtaposition d'une lacune et d'un atome d'azote se substituant à un atome de carbone. Ces lacunes permettent notamment de mesurer optiquement les champs magnétiques et leurs variations.
De son côté, la technologie de Quantum s’appuie sur une approche qui fonctionne indépendamment de la direction du champ magnétique et sans rayonnement micro-ondes. Concrètement, en lieu et place d’un cristal de diamant, des nanoparticules de diamant sont utilisées à l’extrémité d’une fibre optique.
Ainsi, grâce à l'intégration de ces matériaux, même les fissures ou les défauts de matériaux les plus fins peuvent être détectés avec précision. L’orientation statistiquement distribuée des particules élimine la dépendance directionnelle inévitable dans les cristaux, liée à l’anisotropie des propriétés du matériau. La mesure du champ magnétique devient alors isotrope.
Cette technologie présente deux avantages clés. D’une part, elle se caractérise par la possibilité d’accéder à une extrême miniaturisation : les capteurs peuvent être réduits à 100 micromètres. Cette compacité permet une utilisation dans des espaces étroits, pour des tâches de positionnement ou dans des zones où les capteurs traditionnels ne seraient pas utilisables en raison de leur taille.
D’autre part, la fonctionnalité purement optique de ces capteurs permet une isolation galvanique complète. Ainsi, il est possible de prendre des mesures précises à travers des câbles à fibre optique, par exemple, sans connexion électrique. Ces propriétés rendent les capteurs particulièrement adaptés aux applications dans les zones à haute tension, dans les environnements à fort rayonnement électromagnétique ou exposés à des températures extrêmes de - 273 à 600 degrés Celsius.
Qu’attendre des capteurs quantiques dans l’industrie ?
On le voit, l'accent est mis sur ces capteurs quantiques dans la possibilité de réaliser des mesures à des endroits jusqu'alors inaccessibles avec comme conséquence une amélioration de l'assurance qualité de nouveaux produits et processus. Un autre aspect qui suscite un vif intérêt dans l'industrie est la miniaturisation des capteurs. Grâce à des dimensions compactes (la tête du capteur n’est pas plus épaisse qu’un cheveu humain), ils peuvent être intégrés presque partout ce qui augmente la flexibilité dans les applications industrielles.
La robustesse du capteur garantit enfin qu'il fonctionne de manière fiable même dans des environnements difficiles, sans que les données de mesure ne soient faussées par des influences extérieures. De plus, comme ces capteurs fonctionnent de manière purement optique, il est possible de se passer de connexions électriques, ce qui constitue un avantage décisif dans de nombreuses applications.
Actuellement, le capteur de champ magnétique quantique QT DMFS-C2 de Quantum est disponible dans le programme de distribution de reichelt elektronik, avec pour objectif de rendre la technologie accessible à un large public. Équipé d’une fibre optique multimode et conçu pour des températures de fonctionnement de 15 à 25 °C et une puissance de stimulation de 5 mW, ce capteur est adapté à la mesure entièrement optique, galvaniquement isolée et isotrope de l’intensité du champ magnétique dans la plage de 0 à 75 mT. Il nécessite une source de lumière de stimulation d’excitation et un photodétecteur pour l’observation de la fluorescence, mais ne nécessite pas de rayonnement micro-ondes. Outre la photodiode, des filtres appropriés sont nécessaires dans le détecteur pour supprimer la longueur d’onde de stimulation.
(*) La start-up allemande Quantum Technologies, créée en 2020, est une émanation d’un laboratoire de recherche de l’université de Leipzig. La société a réussi à transformer certains principes de la physique quantique en produit industriel simple d’utilisation, à savoir un capteur de mesure de champ magnétique qui se distingue par sa miniaturisation et la réduction de la taille du point de mesure.