Le codec vidéo open source et libre de droits AV1 prend son envol à l’occasion d’IBC 2018

[EDITION ABONNES] Amsterdam - L’édition 2018 du salon IBC, rendez-vous européen incontournable pour toute l'industrie de la production, de la gestion et de la diffusion de contenus audiovisuels et multimédias, a donné l’occasion aux promoteurs du format de compression vidéo AV1 de multiplier les démonstrations autour de cette spécification publiée officiellement en mars dernier. ...Histoire de prouver la tranquille montée en puissance du protégé de l’alliance AOMedia dont l’ambition est de devenir le codec vidéo de référence open source et libre de redevances pour la diffusion de qualité de flux vidéo UltraHD 4K (ou de résolution supérieure) sur Internet et sur les réseaux IP (notamment en diffusion Over-The-Top, OTT).

On se souviendra que l’alliance AOMedia a été créée en septembre 2015 pour développer de nouveaux codecs vidéo et formats multimédias « ouverts », disponibles sans royalties et optimisés pour les contenus disponibles sur le Web. L’objectif sous-jacent étant aussi de couper l‘herbe sous le pied de la norme HEVC (H.265) dont l’usage est soumis au paiement de redevances et qui profite de l’engouement pour la vidéo au format UltraHD 4K. Outre le fait qu’il soit libre de droits, le codec AV1 permettrait également de réduire en moyenne de 30% le taux de compression des flux vidéo UltraHD 4K par rapport aux technologies concurrentes, et ce à qualité d’image similaire voire meilleure…

L’enjeu est de taille car, selon des données fournies par Cisco, 82% de l’intégralité du trafic mondial Internet sera constitué de flux vidéo d’ici à 2021. Dans cette optique, l’ambition de l’alliance AOMedia avec le codec AV1 n’est pas démesurée. Selon la dernière enquête annuelle de la société Bitmovin, un fournisseur de services cloud spécialisé dans le transcodage des flux audio et vidéo en formats de streaming, près d’un tiers (29%) des développeurs interrogés (*) envisagent d’utiliser la technologie AV1 au cours des douze prochains mois, soit deux fois plus qu’il y a un an (14%).

Parallèlement plus d’un tiers des répondants (36%) comptent déployer la technologie H.265, un pourcentage en recul par rapport à l’année dernière (40%). Ces chiffres reflètent une certaine tendance du marché qui va à l’avenir diversifier l’origine de ses codecs de nouvelle génération, estime Bitmovin qui constate quand même que 92% des personnes interrogées utilisent aujourd’hui la technologie H.264/HEVC et que 42% mettent déjà en œuvre H.265/HEVC (contre 28% en 2017). Comme quoi les technologies de la famille MPEG ont quand même encore de beaux jours devant elles…

Parmi les sociétés à effectuer des démonstrations de la technologie AV1 sur IBC, on citera notamment Google et Mozilla, tous deux membres fondateurs de l’alliance AOMedia. Avec, pour le premier, l’affichage d’un flux vidéo HD encodé AV1 (issu de YouTube) dans un appareil grand public (en l’occurrence un modèle 2017 d’un Pixelbook équipé d’un navigateur Chrome). Et pour le second un décodage AV1 au sein du navigateur Firefox. De son côté le français Ateme a pu démontrer la capacité de sa plate-forme d’encodage et de transcodage virtualisée Titan à prendre en charge tout type de standard de compression dont MPEG-2, H.264, HEVC et AV1. Par ailleurs l’organisme VideoLAN, qui est basé en France et qui promeut au niveau international le lecteur multimédia open source VLC, peut d’ores et déjà restituer avec son décodeur logiciel un flux video UltraHD codé AV1.

Enfin le grenoblois Allegro DVT, qui s’est fait une spécialité des jeux de tests de conformité pour décodeurs audio et vidéo, a profité de la tenue d’IBC pour annoncer la disponibilité de flux binaires de test AV1, indispensables pour valider n’importe quelle solution de décodage AV1 vis-à-vis de la syntaxe, des performances et de la résistance aux erreurs. « Nous développons notre suite de test AV1 depuis plus d’un an afin de proposer aux fournisseurs de semi-conducteurs un outil complet permettant de valider leurs implémentations de décodeurs sous toutes les conditions », précise Nouar Hamze, le CEO d’Allegro DVT. La suite de test du Grenoblois aurait déjà été adoptée par plus d’une dizaine de fabricants de semi-conducteurs de premier rang aux Etats-Unis, en Corée du Sud, en Chine et à Taiwan.

On notera enfin que les fournisseurs de circuits Socionext et NGCodec sont déjà sur les rangs pour fournir à l’horizon 2020 des puces AV1, gage de la généralisation du codec dans les équipements d’électronique grand public. A ce titre Socionext a profité d’IBC pour refaire la promotion du prototype d’une implémentation matérielle d’un encodeur AV1 sur FPGA que le fabricant avait présenté au printemps sur le salon américain NAB (lire notre article ici).

(*) L’enquête a été menée auprès de 456 développeurs vidéo travaillant pour des diffuseurs, des éditeurs, des sociétés de services de streaming OTT, des plates-formes vidéo en ligne et des plates-formes de médias sociaux dans 67 pays différents.