L’ultrasobriété des microcontrôleurs, un sujet qui aiguise l’appétit de start-up innovantes

[EDITION ABONNES] La sobriété énergétique est devenue un paramètre essentiel pour les fabricants d’objets connectés alimentés sur piles ou batteries. Rien d’étonnant donc à les voir examiner à la loupe la consommation électrique des composants électroniques qu’ils embarquent dans leurs produits. ...Cette nécessité pour les sociétés de semi-conducteurs de rendre leurs circuits toujours moins gourmands a généré ici ou là des approches qui reposent sur des transistors travaillant tout près, voire au-dessous, de leur tension de basculement (near-threshold ou sub-threshold). C’est notamment la voie suivie depuis quelque temps déjà par l’américain Ambiq Micro pour ses microcontrôleurs 32 bits à cœur ARM Cortex-M4F bâtis sur sa technologie Spot (Subthreshold Power Optimized Technology).

La start-up californienne Eta Compute, créée en 2015, a su cette année apporter sa pierre à l’édifice. En avril 2017, la jeune société a annoncé sous le nom d’EtaCore des blocs d’IP pour microcontrôleurs et puces-systèmes SoC aptes à fonctionner en mode « deep subthreshold » sous des tensions d’alimentation très basses, là où les approches conventionnelles s’avèrent inadaptées. Et ce avec des caractéristiques qui laissent envisager un fonctionnement d’objets connectés avec des sources d’alimentation à récupération d’énergie ambiante sans compromis sur les fonctionnalités et les performances (photo ci-dessus).

C’est tout du moins ce qu’assure Eta Compute qui estime être la seule société aujourd’hui à offrir commercialement une technologie auto-synchronisée avec échelonnage dynamique de tension (DVS) qui soit insensible aux variations des processus de gravure, aux imprécisions des modèles de conception et aux variations de délais sur les chemins de données. Pour prouver ses dires, la start-up affirme avoir déjà mis au point un cœur ARM Cortex-M3 fonctionnant sous une tension comprise entre 0,25 V et 1,2 V une fois gravé en technologie 90 nm basse consommation.

Pour les concepteurs de puces-systèmes, Eta Compute propose aussi des blocs d’IP additionnels fonctionnant sous des tensions très faibles (schéma ci-contre). On trouve ainsi au catalogue de la start-up un circuit intégré de gestion de l’alimentation (PMIC) apte à délivrer une tension variable dynamiquement entre 0,2 V et 1,5 V avec un rendement supérieur à 80%, ainsi qu’un convertisseur A/N à approximations successives 12 bits à 200 kéch./s consommant moins de 3 µW, une horloge temps réel consommant moins de 15 nW, un DSP optimisé pour les applications audio ou un bloc de chiffrement AES-128.

Aux noms d’Ambiq Micro et d’Eta Compute, il convient d’ajouter aussi celui du finlandais Minima Processor. Créée en 2016 et membre fondateur de la fondation RISC-V, cette start-up a tout récemment dévoilé une technologie à ultrabasse consommation pour les conceptions fonctionnant à un niveau proche de la tension de basculement qui s’appuie sur un concept breveté qu’elle a baptisé « dynamic margining ». Ce concept associe matériel et logiciel afin que les circuits puissent fonctionner sous la tension la plus faible possible, quelle que soit la tâche qui leur est assignée, quelles que soient les données qu’ils ont à traiter et quelles que soient les conditions ambiantes sous lesquelles ils doivent fonctionner.

Selon Minima Processor, cette technologie, applicable aux cœurs de processeurs ou de DSP retenus par un concepteur, permet au circuit de modifier en temps réel sa consommation d’énergie en cours de fonctionnement afin de coller aux besoins en performances, aux variations de processus et aux conditions environnementales. Et ce sans la « marge » prévue par les approches conventionnelles et statiques dans les conceptions « near-threshold ».

L’approche de Minima inclut également un procédé ultralarge d’échelonnage dynamique de tension et de fréquence (DVFS) qui permet de modifier la fréquence et/ou la tension de fonctionnement d’un processeur selon les fonctions système actives. Selon Minima Processor, c’est un gain d’un facteur 15 à 20 qui est attendu au niveau de la consommation d’énergie dans toutes les applications qui implémentent à la fois le procédé DVFS ultralarge et le « dynamic margining », par rapport aux conceptions fonctionnant sous tension nominale.

On notera que Minima Processor, qui a réussi à lever en juin 2016 une somme de 5,6 millions d’euros, s’est déjà engagé dans un partenariat avec ARM afin de produire une implémentation à basse consommation d’un processeur ARM Cortex-M3. « Abaisser d’un facteur 15 à 20 la consommation d’une puce-système IoT est particulièrement impressionnant et c’est un événement en mesure d’ouvrir tout un champ de nouvelles applications IoT, assure Phil Burr, directeur du management produit de la société ARM. Le cœur ARM Cortex-M3 est déjà le processeur de choix de milliards de systèmes embarqués et la solution de Minima pour le Cortex-M3, associée au programme ARM DesignStart qui n’exige aucuns frais de licence initiaux, va offrir une combinaison convaincante aux développeurs qui cherchent à créer des objets connectés ultrasobres. »