Le domaine du ferroviaire "connecté" inspire les fournisseurs de cartes et systèmes embarqués

[EDITION ABONNES] Parmi les secteurs d’activité qui consomment beaucoup de cartes électroniques, le domaine du transport au sens large du terme, et plus spécifiquement celui du ferroviaire, demeure très dynamique. En témoigne la pluie d’annonces de cartes et systèmes novateurs, présentés à l’occasion du salon Innotrans, qui vient de se tenir à Berlin. Revue des troupes en présence. ...

Moins médiatique que le domaine de l’automobile qui voit se multiplier les systèmes d’aide évoluée à la conduite et les travaux sur les futures voitures autonomes, le ferroviaire est néanmoins un secteur tout aussi dynamique, avec la mise en place de systèmes embarqués intelligents et connectés. A bord des trains modernes, beaucoup de fonctions comme le contrôle de la vitesse du train, les ouvertures et fermetures de portes, la régulation du chauffage et de l’air conditionné, etc. sont déjà gérées par des calculateurs embarqués constitués pour la plupart, de cartes insérées dans des châssis durcis. Aujourd’hui les technologies embarquées dans les trains vont plus loin, avec la mise en place de réseaux informatiques entre wagons, l’utilisation de communications sans fil, la mise en œuvre à bord de vidéos interactives, avec en sus l’avènement d’un certain niveau de connectivité vers l’extérieur, le tout en respectant des normes de sûreté de fonctionnement et de sécurité très sévères. En conséquence, les fournisseurs de cartes et de systèmes impliqués sur le secteur du ferroviaire, comme les allemands Men Mikro Elektronik et Kontron, le franco-italien Eurotech ou l’américain Artesyn, proposent des systèmes de contrôle complets et/ou des passerelles (gateways) spécifiques, capables de gérer les systèmes d’information pour les passagers (RTPI, Real-Time Passenger Information), les systèmes de collecte d’informations utiles (AFC, Automated Fare Collection) ou encore des transferts de fichiers vidéo sur l’ensemble du train (solutions CCTV, Closed-Circuit Television).

La firme d’outre-Rhin Men Mikro Elektronik, qui vient de rallier l’Unife (Union des industries ferroviaires européennes) pour peser dans les débats sur l’intégration des systèmes numériques dans les trains, a ainsi montré lors du salon Innotrans, qui vient de se tenir à Berlin, le système modulaire de contrôle ferroviaire menTCS (Train Control System). Il s'agit ici d’une plate-forme informatique ouverte conçue pour automatiser le contrôle et la protection des trains. Au cœur de cette architecture matérielle, on trouve la couche logicielle baptisée Pacy, un middleware développé par Men qui gère la communication entre le logiciel applicatif et les cartes d’E/S sécurisées. L’originalité de ce système est que l’architecture logicielle permet de séparer strictement les parties sécuritaires des sous-ensembles qui ne le sont pas afin de réduire les coûts et les temps de développement des applications ainsi que leur certification. Ce middleware assure l’exécution des commandes de l’application indépendamment des entrées/sorties qui disposent de leur propre système de contrôle/commande.

Au-delà, grâce au protocole FSOE (Functional Safety over EtherCAT) intégré dans Pacy, la prise en charge des transmissions sécurisées des données est assurée. De plus, Men assure que des certificats EN 50128 SIL4 individuels seront disponibles pour ce middleware pour la carte CPU sécurisée F75P et le système d’exploitation QNX Secure. Et, pour les fonctions non critiques d’un train, Men a décliné cette architecture avec la solution menRDC (Railway Data Center) basée sur des cartes CompactPCI Serial orchestrées par une carte unité centrale basée sur le Xeon D-1500 à 16 cœurs d’Intel, associée à un sous-ensemble modulaire de stockage conséquent allant jusqu’à 20 To.

Enfin, signalons que Men a présenté sur Innotrans une implantation concrète de test de la plate-forme matérielle/logicielle openETCS, issue d’un programme de R&D de la Communauté européenne conduit par la Deutsche Bahn et qui vise à simplifier la mise en œuvre des futurs équipements ETCS (European Train Control System) standardisés à l’échelle du Vieux Continent. Pour ce faire, la firme allemande a développé une implémentation virtuelle de cette architecture, en la modélisant à partir du logiciel Scade d’Ansys (développé initialement par Esterel Technologies). Les utilisateurs peuvent utiliser cette approche virtuelle pour, par exemple, tester le système menTCS de la société.

De son côté, Eurotech a profité d’Innotrans pour présenter les passerelles multiservices dédiées ferroviaire BoltGATE 20-25 et le serveur BoltCOR 30-17. La passerelle BoltGATE 20-25 est architecturée autour d’un processeur de la famille Atom E38xx d’Intel offrant jusqu'à 4 Go de RAM et 8 Go de mémoire eMMC. L’équipement dispose également de nombreuses interfaces de communication : 2 ports Gigabit Ethernet, un port USB protégé, 4 interfaces série opto-isolées, 6 E/S numériques opto-isolées et des E/S audio et vidéo. Le produit est disponible en outre avec un modem cellulaire universel, Wi-Fi, Bluetooth Low Energy et un GPS interne Dead Reckoning. Côté logiciel, le BoltGATE 20-25 supporte l’architecture ESF (Everyware Software Framework), une édition commerciale du middleware Java/ OSGi en open source Eclipse Kura pour les passerelles IoT. Les applications visées dans les trains sont la vidéosurveillance à bord (CCTV), les systèmes d'information passager, les communications train-sol et la gestion de  flottes. De son côté, le serveur BoltCOR 30-17, intégré dans un rack compact 1U 19 pouces et basé sur une unité centrale dotée de Core i7, de Celeron ou de Xeon d’Intel, est conçu pour des applications de matériels roulants qui nécessitent une classe de température Tx, une performance constante, un niveau élevé de fiabilité et de pérennité, ainsi que des programmes permettant un fonctionnement continu et un service client efficace. Avec, pour la connexion vers l’extérieur, des modems cellulaires, du Wi-Fi (avec support du Mimo), du Bluetooth Low Energy et un GPS.

L’allemand Kontron quant à lui a profité d’Innotrans pour annoncer que son équipement TRACe, introduit sur le marché en 2014 et qui est une unité de calcul embarquée et durcie, a été retenu par la société d’ingénierie française CSIT, spécialisée dans la fourniture de systèmes de communication et d’information intégrés dans les transports.

Si l’Europe est au cœur des innovations dans le secteur ferroviaire, les autres parties du monde s’intéressent aussi de près au potentiel du train, capable de désengorger les voies routières tout en proposant une approche peu polluante. Côté fournisseurs de solutions de technologies de base non européens, c’est l’américain Artesyn qui s’illustre en apportant la certification SIL4 à sa plate-forme de sécurité ferroviaire sur étagère ControlSafe destinée à la conduite des trains et à la signalisation ferroviaire. Lancée officiellement en 2014, elle permet aux développeurs d'applications ferroviaires de réduire les délais de mise sur le marché de leurs équipements grâce à une certification SIL4 (Niveau d’intégrité de sécurité 4), d'ailleurs présentée sur Innotrans. L’idée sous-jacente étant ici de réduire significativement les délais de mise sur le marché sans s'exposer aux risques et aux coûts élevés potentiels liés au processus contraignant de développement et de certification de systèmes SIL4 dont la réalisation peut parfois s'étendre sur plusieurs années.