Réseaux dédiés M2M et IoT : les fabricants de modules radio NB-IoT se pressent au portillon

[EDITION ABONNES] Alors que le 3GPP, l’organisme qui veille jalousement à l’évolution des normes de radiocommunication 2G, 3G et 4G, a bouclé en juin le travail de standardisation du NB-IoT (Narrow Band Internet of Things), l’été 2016 aura été marqué par les annonces de plusieurs fabricants majeurs de modules M2M cellulaires, bien décidés à se positionner rapidement sur un marché qui devrait décoller dès le début de l’année prochaine. ...

Egalement labellisé LTE Cat-NB1 et capable de coller aux contraintes de faible consommation des objets connectés, le NB-IoT est l’une des trois technologies LPWA (Low Power Wide Area) adoptées par le 3GPP pour les marchés du M2M et de l’Internet des objets, les deux autres étant le LTE-M (évolution du LTE aussi dénommée LTE MTC Cat-M1) et l’EC-GSM-IoT (réservé, lui, aux réseaux 2G). Même si quelques correctifs pourraient être apportés dans les prochains mois, toutes les caractéristiques techniques sont désormais figées et seules quelques modifications rétrocompatibles peuvent désormais être apportées au NB-IoT, intégré dans la Release 13 des spécifications 3GPP tout comme le LTE-M et l’EC-GSM-IoT.

L’annonce de l’organisme de standardisation a été bien évidemment saluée par l’alliance GSMA, l’organisme représentant les intérêts des opérateurs de réseaux mobiles, qui estime que ces trois standards permettent de couvrir tous les cas d’usage LPWA. « La GSMA a lancé la Mobile IoT Initiative, dans l’objectif spécifique d’aligner l’industrie mobile derrière des technologies LPWA exploitant le spectre hertzien accessible sous licence et qui soient communes et complémentaires ; nous sommes donc ravis que leur ratification et leur adoption par l’industrie aient été si rapides », a commenté Alex Sinclair, directeur technique de la GSMA.

 

Rappelons que le NB-IoT vise à assurer une très bonne couverture indoor, le support d’un très grand nombre de dispositifs connectés à bas débit, une faible latence, un coût très faible de la connectivité, une basse consommation électrique et une architecture réseau optimisée. Selon l’association GSA (Global mobile Suppliers Association), les déploiements précommerciaux de réseaux IoT basés sur les spécifications 3GPP Release 13 pourraient démarrer dès le second semestre de cette année pour un lancement commercial durant les premiers mois de l’année 2017 (lire les détails ici).

C’est la société suisse u-blox, fournisseur de solutions de géolocalisation et de communication sans fil pour les marchés de l'automobile, de l'industriel et de l'électronique grand public, qui a dégainé le premier sur le créneau du NB-IoT. Fin juin, la firme helvète a annoncé l’échantillonnage pour le quatrième trimestre 2016 de son premier module cellulaire compatible avec ce standard. Conçu pour des applications telles que les villes et les bâtiments intelligents, le comptage d’énergie, les produits blancs, le suivi d’actifs ou la surveillance environnementale, le module - référencé Sara-N2 et présenté en boîtier LGA de 16 x 26 mm - pourra, selon u-blox, fonctionner sur une période de 10 à 20 ans à partir d’une simple et unique pile ou batterie et ce en assurant des débits jusqu’à 227 kbit/s dans le sens descendant et 21 kbit/s dans le sens montant. Son facteur de forme, identique à celui d’autres produits GSM, HSPA ou CDMA de la société suisse, vise à faciliter la mise à jour de designs existants vers la norme NB-IoT, assure encore u-blox.

« Nous avons fait partie des pionniers de la technologie NB-IoT et, à ce titre, nous avons collaboré étroitement avec des sociétés comme Vodafone, Deutsche Telekom et Huawei pour réaliser des démonstrations commerciales de versions NB-IoT préliminaires dans des applications de compteurs d’eau et de parking intelligent », a rappelé Simon Glassman, en charge des partenariats stratégiques EMEA chez u-blox. A cet égard, M. Glassman a précisé à L’Embarqué que le module Sara-N2 s’appuyait sur un circuit initialement développé par Neul, jeune firme avalée par Huawei en 2014, et désormais fabriqué par HiSilicon, une société de semi-conducteurs fabless appartenant à l’équipementier chinois. On ajoutera que Vodafone, de son côté, a récemment annoncé qu’il envisageait d’ici 2020 de déployer le NB-IoT au sein de toutes ses stations de base 4G-LTE.

Selon u-blox, le NB-IoT offre plusieurs avantages sur d’autres technologies radio cellulaires comme une moindre complexité système, un mode de fonctionnement à ultrabasse consommation, le support de 150 000 « objets » par cellule radio ou un budget de liaison de 20 dB supérieur à celui du GPRS, caractéristique qui garantit de très bonnes performances indoor même dans des conditions de faible couverture radio (intérieurs d’immeubles, sous-sols, etc.).

Comparé aux technologies LPWA utilisables dans des bandes de fréquences accessibles sans licence (Sigfox, LoRa…), le NB-IoT se distinguerait, toujours selon u-blox, par une plus grande sécurité et une meilleure qualité de service du fait de son déploiement au sein de réseaux cellulaires exploitant des bandes gérées par des opérateurs qui disposent de licences ad hoc, réseaux donc mieux protégés contre les interférences. Autres avantages du NB-IoT évoqués par la société suisse : une latence plus faible que celle offerte par les réseaux maillés grâce à sa topologie point à point, sa capacité à être déployé dans des canaux adjacents aux canaux 2G et LTE existants (puisqu’il n’utilise que 200 kHz de bande passante) et une puissance d’émission limite plus élevée. Intrinsèquement bidirectionnel, le NB-IoT devrait autoriser aussi les mises à jour over-the-air de logiciels de bas niveau.

u-blox n’est plus toutefois le seul fabricant de modules à avoir affirmé son intention de lancer en production de volume des produits NB-IoT dès le début 2017. Durant le mois d’août, le fabricant chinois Quectel a annoncé le lancement durant le quatrième trimestre 2016 du module NB-IoT BC95, présenté comme le premier module cellulaire de l’empire du Milieu conforme à la spécification 3GPP Release 13. Il est compatible avec le modèle GSM/GPRS M95 de la firme asiatique afin de faciliter, là aussi, la migration des designs existants. Selon Quectel, l’opérateur China Unicom a commencé à déployer des réseaux NB-IoT sur Shanghai, la technologie étant aussi fortement poussée par l’équipementier télécoms Huawei. Ce dernier a d’ailleurs a profité du Mobile World Congress Shanghai qui s’est tenu du 29 juin au 1er juillet pour dévoiler une solution d’infrastructure de bout en bout (du capteur jusqu’au cloud) compatible NB-IoT.

Conçue pour les opérateurs télécoms, la solution de Huawei sera disponible à partir de septembre, déployée au sein d’un vaste projet pilote au cours du quatrième trimestre et potentiellement utilisable dans des déploiements commerciaux courant décembre. Dans la pratique, le portefeuille NB-IoT de l’équipementier est constitué d’une offre pour les objets connectés et les équipements intelligents, basée sur un circuit ad hoc (sans doute celui de HiSilicon) et l’environnement logiciel LiteOS de la société, et de stations de base eNodeB pouvant aisément évoluer vers le nouveau standard (dixit la firme chinoise). La solution NB-IoT de bout en bout de Huawei comprend également une architecture cloud pour cœur de réseau IoT (IoT Packet Core) dotée de capacités de virtualisation de fonctions réseau NFV, ainsi qu’une plate-forme de gestion de la connectivité IoT, également basée dans le nuage et forte de mécanismes de gestion de flux massif de données (Big Data).

Après u-blox et Quectel, Telit a également dévoilé ses intentions en matière de NB-IoT. La firme italo-britannique va saisir l’occasion du salon américain CTIA Super Mobility qui se tient du 7 au 9 septembre prochains pour annoncer plusieurs modules cellulaires compatibles avec les spécifications 3GPP Release 13. Il s’agit en l’occurrence de quatre modèles LTE Cat-M1 (LTE-M) pour le marché américain et d’un modèle LTE-NB1 (NB-IoT) pour le marché européen. Les premiers offrent un débit crête directionnel de l’ordre du mégabit par seconde, tandis que le dernier (référencé NE866) supporte des transmissions de données de l’ordre de 250 kbit/s dans le sens descendant pour un débit de 20 kbit/s dans le sens montant. De par ses dimensions, le module NB-IoT NE866 pourra être substitué aux variantes 3G xE866 de 15 x 19 mm de Telit sur des designs existants, assure la société. La disponibilité commerciale des produits est prévue début 2017.

Enfin, côté fournisseurs de circuits intégrés, on notera qu’outre HiSilicon, les sociétés de semi-conducteurs Altair (filiale de Sony), Qualcomm, Sequans et Nordic Semiconductor ont déjà dévoilé leur intention de jouer des coudes sur le marché des composants LTE-M et/ou NB-IoT. A suivre donc.