"L’Internet des objets est une révolution comparable à celle d'Internet il y a 20 ans"

[SPECIAL ABONNES] L'Embarqué a assisté aux Matinales de l’embarqué organisées par Cap’tronic à l’occasion du salon Enova Lyon. Le CEA-Leti, par la voix de Jean-Michel Goiran, corporate business development, y a exposé sa vision de l’Internet des objets. Synthèse des propos. ...

« L’Internet des objets, ce n’est pas seulement ajouter de la connectivité aux objets, c’est utiliser cette connectivité pour valoriser des données, des usages et de nouveaux services et créer de nouveaux modèles économiques. Et, aujourd’hui, nous sommes à l’aube d’une révolution industrielle que l’on peut comparer à celle de l’Internet dans les années 1990. » Pour Jean-Michel Goiran, chargé depuis juin 2013 de consolider l’offre technologique du CEA-Leti pour le marché de l’Internet des objets (IoT), cette comparaison se justifie d’autant plus que les deux phénomènes ont pris de l’ampleur grâce à la concomitance de plusieurs facteurs déclencheurs.   Rappel : dans les années 1990, la vague de l’Internet a profité de la maturation du marché du PC, d’une infrastructure téléphonique de bonne qualité, d’une capacité de traitement ad hoc au niveau des composants électroniques et de l’arrivée d’outils normalisés comme le langage HTML. « Au cours de la décennie actuelle, l’Internet des objets va, quant à lui, surfer sur la généralisation de l’usage des smartphones, sur une infrastructure mobile quasi omniprésente, sur des standards de communication adaptés tels que 6LoWPAN, ZigBee, Wi-Fi, NFC, RFID ou IEEE 802.15.4. et sur la disponibilité de processeurs éco-efficaces au bon rapport coût/performances et au packaging adapté, a détaillé Jean-Michel Goiran à l’occasion des Matinales de l’embarqué organisées par Cap’tronic en marge du salon Enova Lyon qui s’est tenu les 12 et 13 février dans la capitale rhônalpine. Il faut ajouter à cette liste l’émergence de nouvelles technologies de capteurs et de récupération d’énergie ambiante. »   Des domaines d'application apparaissent   D’ores et déjà, plusieurs domaines d’application de l’Internet des objets commencent à se développer. Et le représentant du CEA-Leti de citer nommément la ville intelligente et les compteurs d’énergie communicants (avec un marché des technologies afférentes qui pourrait tripler entre 2012 et 2020), la télésanté (surtout aux Etats-Unis et dans les pays où le coût de la santé est directement à la charge du citoyen), la sécurité et la vidéosurveillance, et, enfin, la production "évoluée", là où des gains de productivité de 20% sont attendus grâce aux objets connectés. Si l’Internet des objets décolle, c’est que les briques de base matérielles et logicielles qui le sous-tendent sont en place. « Les infrastructures sont toujours en avance sur les services, précise Jean-Michel Goiran. La France, par exemple, dispose de l’un des meilleurs taux de pénétration de l’Internet dans la maison, la 4G se généralise et les standards de communication longue distance adaptés aux besoins de l’IoT existent déjà. Deux des cinq standards en lice, l’UNB de Sigfox et la technologie LoRa de Semtech en l'occurrence, sont d’ailleurs d’origine française. »
Bruit de bottes sur le marché de l'Internet des objets   Les logiciels ne sont pas en reste. Ici et là émergent des middleware distribués comme AllJoyn de Qualcomm ou Qeo de Technicolor et apparaissent des acteurs dédiés proposant des plates-formes informatiques en nuage de type SaaS (Software as a Service) à l’instar de ThingWorx, de Jasper Wireless ou d’Axeda. « Preuve de l’ébullition du marché de l’Internet des objets, on assiste à de grandes manœuvres de la part des poids lourds de l’industrie pour acquérir rapidement des technologies, des produits ou des services liés au M2M ou à l’IoT, ajoute M. Goiran. Le rachat du fabricant de thermostats connectés Nest par Google est symptomatique du phénomène. Mais l’année dernière on avait vu Cisco mettre la main sur Ubiquisys et ARM s’offrir Sensinode. En d’autres termes, pour les entreprises, c’est le bon moment pour investir dans l’Internet des objets et mettre à jour leurs gammes de produits. »   Evidemment, le CEA-Leti prêche pour sa paroisse. Le laboratoire grenoblois estime disposer de compétences qui s’avèrent fondamentales en matière d’Internet des objets et peut intervenir au niveau de cinq fonctionnalités : l’autonomie et l’efficacité des produits (récupération d’énergie ambiante, protocoles RF basse consommation, optimisation des liens radio, etc.), la miniaturisation et la mutualisation des fonctions (intégration d’antennes, intégration sur surfaces souples, réduction de la finesse de gravure, intégration électronique/optique …), l’augmentation des capacités de détection et de contrôle, la connectivité (NFC haut débit, réseaux radio corporels BAN, UNB, radio cognitive…) et les communications sécurisées.   De l'électronique dans les fibres textiles   Dans le domaine particulier de la miniaturisation, le représentant du CEA-Leti a mis, dans son intervention, l’accent sur la technologie de micropackaging silicium E-Thread qui a été mise au point par le laboratoire grenoblois et qui permet d’intégrer de l’électronique dans les fibres textiles. Essaimée en 2013 vers la start-up Primo1D, cette technologie promet des applications dans le domaine de la traçabilité par puce RFID pour la blanchisserie industrielle, la location de linge ou encore la distribution textile. Mais elle permet également l’insertion de LED dans les fils pour la décoration haut de gamme (voir photo ci-contre).   En citant Apix et BeSpoon, Jean-Michel Goiran a également mis en avant deux autres start-up françaises ayant bénéficié des résultats de travaux du CEA dans des domaines connexes à l’Internet des objets, en l’occurrence un spectromètre de masse sur une puce pour le premier, et une technique de géolocalisation indoor basée sur la modulation ultralarge bande UWB pour le second.