La 5G fait déjà phosphorer l’industrie des radiocommunications mobiles

La 4G à peine déployée, voilà que certains industriels des télécommunications évoquent déjà la 5G attendue aux alentours de 2020 ! Une cinquième génération qui, sans nul doute, offrira les débits toujours plus élevés réclamés par les utilisateurs de mobiles, mais qui devra aussi s’adapter aux contraintes des communications M2M. ...

Alors que les déploiements commerciaux des premiers réseaux mobiles LTE (labellisés 4G par les opérateurs) n’ont véritablement démarré en France que cette année, certains équipementiers n’hésitent plus à évoquer explicitement la 5G ! Fin août, le chinois Huawei, via divers porte-parole, s’est ainsi haussé du col pour proclamer dans les colonnes de magazines prestigieux que plusieurs centaines de ses ingénieurs planchaient déjà sur la question. Avec un objectif en tête : déployer des premiers réseaux mobiles opérationnels aux alentours de 2020 avec une capacité de 10 Gbit/s, soit cent fois plus qu’actuellement… Pourvu, évidemment, que le spectre hertzien ad hoc soit disponible à ce moment-là.   Quelques mois plus tôt, c’était le coréen Samsung qui avait défrayé la chronique en dévoilant avoir mis au point un système multi antennaire qualifié de 5G, apte à émettre et réceptionner des données en mobilité à un débit de 1 Gbit/s sur une distance d’environ deux kilomètres. De la taille d’une boîte d’allumettes, ce système prototype met en œuvre 64 antennes miniatures exploitant la bande des 28 GHz et s’avère capable, via des algorithmes de traitement du signal associés, de générer un faisceau de seulement 10° d’ouverture dont la direction varie de manière dynamique pour « suivre » les terminaux mobiles. Une approche qui permettrait de contourner les caractéristiques inhérentes aux fréquences millimétriques (propagation entravée par la pluie et le brouillard, diffraction sur les constructions et la végétation, quasi-obligation de travailler en vue directe, etc.).   Selon Samsung, l’architecture multiantennaire favorise la concentration de l’énergie radio au sein de faisceaux étroits et directionnels, pour un gain supérieur sans augmentation de la puissance d’émission. Potentiellement utilisable dans différentes bandes de fréquence comprises entre 3 et 300 GHz, le système développé par le Coréen a pu transférer des données à plus de 1 Gbit/s vers deux terminaux mobiles situés à deux kilomètres en vue directe et se déplaçant à une vitesse de 8 km/h. La portée tombe toutefois à quelques centaines de mètres lorsqu’émetteur et récepteur ne sont plus en vue directe.
Coup d'envoi de la normalisation en 2015   Les récentes annonces de Huawei et de Samsung ne représentent toutefois que le sommet de l’iceberg. D’autres entreprises traditionnellement impliquées sur les recherches en amont liées aux technologies mobiles (Ericsson et NTT DoCoMo en tête) ont également levé le voile, mais plus discrètement, sur leurs avancées en matière de 5G. « La standardisation des technologies 5G ne devrait véritablement démarrer qu’en 2015-2016 et le coup d’envoi du processus sera donné lors de la Conférence mondiale des radiocommunications (CMR) de 2015, organisée par l’UIT, nuance néanmoins Guang Yang, analyste en charge des plates-formes et réseaux sans fil chez Strategy Analytics. En conséquence, toutes les recherches qui tournent aujourd’hui autour de la 5G permettent simplement aux industriels d’échauffer leurs muscles en prélude des travaux officiels de normalisation. Ces activités revêtent toutefois une importance certaine car elles vont dégager des consensus techniques et préparer le futur écosystème. C’est aussi une période clé pour les principaux développeurs de technologies qui peuvent déjà faire des hypothèses sur les briques de base de la 5G et sécuriser en conséquence les brevets afférents. En ce sens, les deux prochaines années seront certainement décisives. »     L'environnement auquel sera confronté la 5G à l'horizon 2020 (source : Ericsson)   Pour la plupart des observateurs, la montée en débit (et en fréquence) n’est toutefois que l’un des futurs aspects de la 5G, et peut-être pas forcément le plus important. Lancé en novembre 2012 pour une durée de deux ans et demi, le projet européen Metis (Mobile and wireless communications Enablers for Twenty-twenty (2020) Information Society), qui doit contribuer aux propositions du Vieux Continent lors de la CMR 2015, a cherché à énumérer les besoins que les futurs systèmes 5G auront l'obligation de satisfaire. Outre le fait que les opérateurs devront offrir un débit d’accès moyen par utilisateur de dix à cent fois plus important qu’aujourd’hui, la 5G aura à gérer de dix à cent fois plus d’appareils connectés simultanément, montée en puissance des applications M2M et de l’Internet des objets oblige. Une contrainte qui va nécessiter l’implémentation de technologies offrant une plus grande versatilité et une plus grande échelonnabilité en débit que celles actuellement déployées et adaptées aux applications traditionnelles des réseaux mobiles. En corollaire, des améliorations devront être apportées à l’autonomie des équipements M2M avec l’objectif de décupler la durée de vie des sources d’alimentation, piles ou batteries.   L'Europe va investir 50 M€
pour le développement de la 5G   La 5G, enfin, devra assurer la transmission de volumes de données mobiles 1000 fois plus élevés par cellule, tout en garantissant un délai de latence de bout en bout divisé par cinq, pour des interactions plus souples et une expérience utilisateur toujours améliorée. Doté d’un budget de près de 30 millions d'euros, dont la moitié apportée par la Commission européenne, le projet Metis réunit treize organismes de recherche académiques, cinq opérateurs (Deutsche Telekom, NTT DoCoMo, Orange, Telecom Italia et Telefonica), le constructeur automobile BMW, ainsi qu’Alcatel-Lucent, Ericsson, Huawei, Nokia (dont les activités terminaux et services vont passer dans le giron de Microsoft) et NSN (désormais aux mains du seul Nokia).   Pour l’Europe, quoi qu'il en soit, la 5G est un objectif majeur, comme a tenu à le rappeler, lors du Mobile World Congress de février 2013, Neelie Kroes, vice-présidente de la Commission européenne. A cette occasion, elle a annoncé que 50 millions d’euros seront investis dans la recherche pour assurer la mise en place de la technologie mobile 5G à l'horizon 2020, l'objectif étant de ramener l’Europe dans le peloton de tête de l’industrie mondiale de la téléphonie mobile. A cet égard, on notera qu’au moins une dizaine de projets européens liés de près ou de loin à cette cinquième génération (ainsi qu’aux évolutions des actuelles technologies LTE et LTE-Advanced) sont déjà sur les rails. Parmi ceux-ci on citera, outre Metis, 5GNow (5th Generation Non-Orthogonal Waveforms for Asynchronous Signalling) (2012-2015), un projet coordonné par le Fraunhofer Institute avec la participation notamment du CEA-Léti, d’Alcatel-Lucent et de National Instruments.