Yannick Delibie, Kerlink : "Le marché des plates-formes M2M en nuage commence à se structurer"

Les plates-formes M2M dans le cloud peuvent aujourd’hui se scinder en trois catégories différentes selon les fonctions qu’elles assurent. Face à la prolifération attendue des objets connectés à l’Internet, leur capacité de mise à l’échelle (ou « scalabilité ») est impérative. Tel est l’avis de Yannick Delibie, directeur technique et stratégique de Kerlink, fournisseur de solutions M2M sur les marchés du comptage d’énergie intelligent et du transport de personnes et de marchandises.  ...

On associe de plus en plus le M2M à la notion de cloud et de plate-forme informatique en nuage, sans que l’on sache exactement de quel type de plate-forme il s’agit. Comment voyez-vous le marché se structurer ? YANNICK DELIBIE Dans le domaine du M2M, il existe un consensus général sur la définition du service à offrir. Les différents intervenants dans la chaîne de valeur se doivent de mettre des données métier à la disposition du système d’information de l’utilisateur final, que celui-ci soit un exploitant de réseau de distribution d’énergie, un gestionnaire de parcs de machines, un gestionnaire de flottes de véhicules, etc. Pour mener à bien cette mission, il est nécessaire de déployer plusieurs plates-formes, plus ou moins génériques, que l’on peut classer en trois grandes catégories. Dans la première catégorie, on trouve les services applicatifs qui récupèrent les données métier non structurées et qui les placent là où le système d’information du client peut les exploiter (base de données, systèmes de stockage, etc.). La deuxième catégorie est constituée des plates-formes d’interconnexion, de routage et de transfert qui véhiculent les données entre, d’un côté, les capteurs, dispositifs embarqués et autres équipements M2M, et, de l’autre, les plates-formes de la première famille. Ces fonctions de data forwarding sont en général fournies par les opérateurs classiques ou des opérateurs M2M spécifiques, comme Sigfox par exemple. Enfin, dans la troisième catégorie, on retrouve les plates-formes de device management qui se chargent de la supervision et du maintien opérationnel des équipements M2M.   Cette dernière prestation n’est-elle pas fournie par certains fabricants de modules sans fil M2M ? YANNICK DELIBIE Oui, mais en général ce sont des plates-formes de device management qui restent liées à un fabricant en particulier. Aujourd’hui, il existe des offres un peu plus génériques, issues notamment du monde traditionnel des télécommunications et basées sur le protocole standardisé TR-069. A cet égard, il faut signaler que, plus globalement, un gros effort de standardisation a été entrepris par l’Etsi, et plus particulièrement par le groupe de travail M2M, pour définir une architecture commune de transfert des données entre les équipements et les systèmes d’information, avec prise en compte des plates-formes de device management. Et l’organisme de normalisation semble vouloir tendre plutôt vers une solution à base du protocole TR-069 plutôt que vers une approche OMA DM, un temps évoquée. L’Etsi compte même à terme standardiser le format de représentation des données métier.   Avec l’Internet des objets et les prévisions de plus de 50 milliards d’objets connectés à l’horizon 2020, quelle est la caractéristique essentielle que doivent afficher ces plates-formes ? YANNICK DELIBIE La « scalabilité » ou la capacité de mise à l’échelle est un critère particulièrement critique pour les plates-formes de transfert de données et les plates-formes de device management. Prenons l’exemple de la télérelève de compteurs de gaz. Dans le cas de figure classique, le système d’information de l’exploitant est connecté aux seuls concentrateurs qui, eux, se chargent de récupérer les informations des compteurs par voie radio. Ces concentrateurs, il en existe grosso modo entre 20 000 et 30 000 dans un pays comme la France. Mais, à l’horizon 2025, avec une infrastructure tout IP, les concentrateurs seront remplacés par des routeurs IP et le système d’information se retrouvera en frontal avec des données émises directement par plusieurs millions de compteurs. Les plates-formes de services devront être capables de suivre et de gérer cette masse d’informations, ce tsunami de « Big Data » !     En tant que fournisseur d’équipements M2M, quels sont les intervenants dans la chaîne de valeur avec lesquels vous êtes directement en contact lors de projets ? YANNICK DELIBIE Nous collaborons en général avec l’exploitant final ainsi qu’avec le fournisseur de la plate-forme de transfert des données et le fournisseur de la plate-forme de supervision et de maintenance opérationnelle des équipements. C’est notamment la situation qui prévaut sur des projets de relevé de compteurs auxquels nous participons avec, notamment, la société Ondeo Systems.

Propos recueillis par Pierrick Arlot